Repiquage et backcrossing sont deux outils fondamentaux de la sélection généalogique en apiculture.
Bien que proches, ces techniques poursuivent des objectifs différents et répondent à des logiques complémentaires dans la construction d’une lignée performante et adaptée à votre environnement.
Le repiquage : une sélection par le terrain
Le repiquage consiste à identifier une colonie issue d’un élevage antérieur (souvent une fille ou petite-fille d’une F0) qui présente des qualités remarquables observées sur le terrain, puis à élever de nouvelles reines à partir d’elle.
Exemple concret :
Vous avez élevé des F1 à partir d’une reine F0 sélectionnée. Après une ou deux saisons, l’une d’elles montre une excellente productivité malgré un climat difficile, une grande douceur et peu d’essaimage. Vous décidez alors de la repiquer : vous prélevez des larves chez cette colonie pour élever une nouvelle génération.
🎯 Objectif : stabiliser un phénotype jugé optimal dans vos conditions locales.
🟢 Avantages :
- Facile à mettre en œuvre avec un petit cheptel.
- Basé sur l’observation réelle, pas uniquement sur la généalogie.
- Favorise l’adaptation locale.
🔴 Limites :
- Si pratiqué sans introduction de diversité : risque de consanguinité.
- Repose sur la fécondation naturelle, ce qui peut introduire une forte variabilité génétique.
Comprendre la fécondation naturelle (ou ouverte)
Dans le repiquage, les reines élevées sont généralement fécondées naturellement, en vol, par les mâles présents dans l’environnement. Cette fécondation ouverte signifie que :
- Vous maîtrisez la génétique maternelle (la colonie source),
- Mais pas la génétique paternelle : les mâles peuvent provenir de vos ruches, mais aussi de ruchers voisins, parfois de souches non désirées.
🎯 Conséquence : la transmission des qualités observées chez la mère est aléatoire sur 50 % du génome. Certaines filles peuvent ne pas hériter des caractères recherchés.
✅ Comment limiter cette variabilité ?
- Travailler en zone isolée (montagne, plateau, vallée fermée).
- Saturer l’environnement avec des ruches à mâles issus de vos lignées sélectionnées.
- Ou passer à la fécondation dirigée (station de fécondation ou insémination instrumentale).
Le backcrossing : renforcer une souche par recroisement
Le backcrossing consiste à croiser une descendante avec une souche d’origine, pour fixer ou renforcer un trait génétique précis. Cela implique souvent :
- Croiser une F1 avec des mâles issus de la même F0 (ou d’une sœur),
- Ou croiser une F2 avec des mâles très proches de la lignée initiale.
🎯 Objectif : maîtriser la dérive génétique et stabiliser un caractère ciblé.
🟢 Avantages :
- Permet de conserver ou renforcer un caractère clé.
- Très utilisé dans les programmes de sélection structurée (comme la Buckfast).
- Utile pour fixer des caractères récessifs.
🔴 Limites :
- Nécessite une traçabilité stricte et un carnet d’élevage.
- Requiert souvent une fécondation dirigée.
- Moins accessible aux apiculteurs sans contrôle des mâles.
Le backcrossing up : améliorer par retour croisé
Le backcrossing up est une variante ascendante du backcrossing. Il consiste à recroiser une descendante performante avec une autre F0 ou une souche jugée « supérieure », pour :
- Réintroduire de la vigueur,
- Renforcer un caractère absent,
- Faire progresser la sélection (d’où le terme « up »).
🧠 C’est un outil d’amélioration génétique progressive, là où le repiquage vise plutôt une stabilisation sur le terrain.
📊 Tableau comparatif
| Critère | Repiquage | Backcrossing | Backcrossing up |
|---|---|---|---|
| But principal | Stabiliser un phénotype | Fixer un caractère | Améliorer génétiquement |
| Base de décision | Observation terrain | Généalogie | Généalogie + performance |
| Type de fécondation | Naturelle (ouverte) | Dirigée (souvent) | Dirigée ou assistée |
| Risques | Dérive phénotypique | Consanguinité | Déséquilibre génétique |
| Idéal pour | Rucher local, sédentaire | Élevage structuré | Sélection multigénérationnelle |
Quelle méthode privilégier en montagne ?
Dans un contexte sédentaire et montagnard, avec une saison courte et peu d’accès à des mâles sélectionnés :
- Le repiquage est souvent le plus adapté : il vous permet de valoriser les lignées locales les mieux adaptées à vos conditions.
- Un backcrossing up ponctuel, avec des mâles issus de F0 ou de souches bien caractérisées, peut compléter efficacement le dispositif si vous avez accès à une station de fécondation ou à l’insémination.
✅ Conclusion
Repiquage et backcrossing ne s’opposent pas : ils se complètent intelligemment.
- Le repiquage vous permet d’ancrer la sélection dans la réalité de votre rucher.
- Le backcrossing vous aide à stabiliser les lignées et à maîtriser la transmission des caractères.
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