La visite d’un Technicien Sanitaire Apicole (TSA) n’est pas une formalité. C’est une mission encadrée par le Code rural1, à la croisée du conseil technique et du contrôle sanitaire. Elle permet d’assurer la santé des colonies, de repérer précocement les maladies réglementées, et de renforcer la traçabilité des pratiques apicoles.
1. Le déroulement de la visite
La visite d’un TSA se déroule en trois temps :
Accueil et présentation
Le technicien se présente à l’apiculteur, précise le motif de la visite (prophylaxie, visite de routine, suspicion sanitaire dans la zone) et rappelle son rôle.
Entretien
Un échange s’engage sur la gestion du rucher : pratiques de nourrissement, traitements anti-varroa, transhumance, renouvellement des cires, éventuelles pertes hivernales.
Observation du rucher
Le TSA examine les ruches sur place :
- vitalité des colonies,
- état de la ponte,
- réserves de miel et de pollen,
- éventuels signes de pathologies (loque américaine ou européenne, varroose, nosémose…).
Cette étape se conclut par des recommandations personnalisées : bonnes pratiques sanitaires, calendrier de traitement, gestion des cires et des réserves, rappel des obligations réglementaires.
2. Les documents vérifiés
Le TSA doit pouvoir consulter certains documents obligatoires :
- Registre d’élevage ou registre apicole,
- Déclaration annuelle de ruches2 (entre le 1er septembre et le 31 décembre),
- Carte d’immatriculation apicole3,
- Factures d’achat ou de cession d’abeilles et de reines,
- Factures de médicaments vétérinaires (Apivar, Apistan, Varromed, etc.),
- Bons de transport4 / déclarations de transhumance5 le cas échéant.
Ces pièces assurent la traçabilité sanitaire du rucher.
3. Le procès-verbal de visite
Au terme de la visite, le TSA rédige le Procès-verbal de visite sanitaire du rucher, en trois exemplaires :
A. En-tête
Identité de l’apiculteur, coordonnées, numéro d’immatriculation, date et motif de la visite.
B. Conduite de l’élevage
Nombre de ruches visitées, description des pratiques (nourrissement, lutte contre le varroa, renouvellement des cires, transhumance).
C. État sanitaire
Présence ou absence de signes cliniques pour chaque maladie apicole réglementée.
D. Conclusions
Avis du TSA : rucher sain ou non, constats éventuels de non-conformité, recommandations et prescriptions.
E. Signature
Le document est signé par le TSA et l’apiculteur. La signature du second atteste qu’il a bien pris connaissance des constats, sans nécessairement approuver les conclusions.
4. Répartition des exemplaires
Le document existe en trois copies :
| Exemplaire | Destinataire | Utilité |
|---|---|---|
| 1 | DDPP / DDCSPP | Transmission administrative officielle |
| 2 | Apiculteur | Suivi, preuves, recommandations à mettre en œuvre |
| 3 | TSA | Archive personnelle et suivi du rucher |
L’apiculteur doit toujours repartir avec sa copie, remise et signée immédiatement à la fin de la visite.
5. Cas particuliers : validation vétérinaire
Dans 95 % des cas, la procédure s’arrête là.
Mais si une maladie réglementée (comme la loque américaine) est suspectée ou confirmée, le vétérinaire conseil entre en jeu.
- Le TSA agit sous sa responsabilité technique.
- Le rapport est alors soumis à validation du vétérinaire avant envoi à la DDPP.
- Le vétérinaire peut co-signer le rapport, notamment lorsqu’il entraîne des mesures administratives (arrêté préfectoral, destruction du matériel, etc.).
Même dans ce cas, l’apiculteur conserve immédiatement son exemplaire signé par le TSA : il ne repart jamais les mains vides.
6. Cas particulier : ruchers multiples ou éloignés du domicile
La visite sanitaire n’a pas lieu au domicile de l’apiculteur, mais sur le rucher lui-même — c’est-à-dire là où sont réellement implantées les colonies.
Or, nombre d’apiculteurs possèdent plusieurs ruchers, parfois situés à des dizaines de kilomètres de leur habitation principale, ou déplacent leurs ruches selon les miellées (sapin, lavande, châtaignier, etc.).
Dans ce cas :
- Le TSA contacte l’apiculteur en amont pour déterminer quel rucher visiter (accessible, représentatif ou à risque particulier).
- L’apiculteur doit pouvoir indiquer précisément l’emplacement du ou des ruchers actifs : coordonnées, commune, lieu-dit, voire coordonnées GPS.
- Le procès-verbal mentionne la localisation exacte : “Visite effectuée sur le rucher de [commune, lieu-dit], représentant X colonies sur Y ruches déclarées.”
- Si les ruches sont transhumantes, le TSA peut consulter les bons de transport ou déclarations de transhumance, afin de situer la visite dans le contexte de déplacement saisonnier.
Dans certaines zones de montagne ou de plaine, les GDSA organisent même des tournées collectives pour mutualiser les déplacements des TSA.
L’essentiel est que les abeilles soient visitées là où elles se trouvent réellement, et non selon la seule adresse administrative de l’éleveur.
En résumé
La visite du TSA, c’est bien plus qu’un simple contrôle :
c’est une rencontre technique, réglementée et bienveillante, au service de la santé des abeilles et de la rigueur des élevages.
Elle garantit la traçabilité des pratiques et renforce la résilience sanitaire du cheptel apicole.
🔹 Références principales
1. Code rural et de la pêche maritime – Article L201-1
« L’État organise la surveillance et la prévention des dangers sanitaires menaçant les animaux […] avec la participation d’organisations à vocation sanitaire agréées. »
👉 C’est sur ce fondement que les GDSA (Groupements de Défense Sanitaire Apicole) et leurs techniciens (les TSA) agissent.
2. Article L201-8 du même code
« Les organismes à vocation sanitaire agréés peuvent faire appel à des agents techniques, les techniciens sanitaires apicoles, pour réaliser les visites sanitaires et les opérations de prophylaxie. »
👉 C’est la base légale directe de la fonction de TSA : ils interviennent au titre de la prophylaxie, sous responsabilité vétérinaire.
3. Décret n°2012-845 du 30 juin 2012 relatif aux dangers sanitaires et à la gouvernance sanitaire
Ce décret précise la notion de “technicien sanitaire apicole” et les conditions dans lesquelles il agit au nom des organismes sanitaires agréés.
4. Arrêté du 12 janvier 2001 (modifié), fixant les mesures techniques et administratives relatives à la prophylaxie des maladies réputées contagieuses des abeilles
Cet arrêté détaille les maladies concernées par la surveillance (loque américaine, varroose, nosémose, etc.) et les obligations de contrôle sanitaire.
5. Circulaire DGAL/SDSPA/2010-8196 du 18 octobre 2010
Relative à la mise en place du réseau des TSA, elle décrit le cadre opérationnel des visites, la formation, le suivi administratif et la rédaction des procès-verbaux.
- Les visites des Techniciens Sanitaires Apicoles (TSA) sont encadrées par les articles L201-1 et L201-8 du Code rural et de la pêche maritime, ainsi que par le décret n°2012-845 du 30 juin 2012 et l’arrêté du 12 janvier 2001 relatif à la prophylaxie apicole. Elles sont conduites sous la responsabilité du vétérinaire sanitaire, conformément aux orientations de la DGAL (circulaire 2010-8196). ↩︎
- Déclaration annuelle de ruches —
En France, toute personne détenant au moins une ruche (même à titre amateur) doit effectuer une déclaration annuelle de ruches entre le 1er septembre et le 31 décembre de chaque année, conformément à l’article L221-1 du Code rural et de la pêche maritime et à l’arrêté ministériel du 7 juin 2010 relatif à l’identification et à la déclaration des ruchers.
Cette déclaration est obligatoire pour tous les apiculteurs, qu’ils soient professionnels, pluriactifs ou de loisir, et ce dès la première ruche. Elle permet :
– d’assurer le suivi sanitaire du cheptel apicole,
– de faciliter les interventions vétérinaires et prophylactiques (notamment les visites TSA),
– et de fournir aux pouvoirs publics (DGAL, GDSA, INRAE) une cartographie des ruchers utile à la lutte contre les maladies et les prédateurs (ex. frelon asiatique).
La déclaration se fait en ligne sur la plateforme officielle mesdemarches.agriculture.gouv.fr ou via l’espace Téléruchers – FranceAgriMer.
Un numéro d’apiculteur (NAPI) est alors attribué à vie, et un récépissé est délivré immédiatement : ce document doit être présenté lors des visites TSA et conservé dans le registre d’élevage.
La gestion et la centralisation des données sont assurées par le Ministère de l’Agriculture (DGAL), avec transmission automatique aux DDPP et aux organismes sanitaires apicoles.
Le non-respect de cette obligation peut entraîner la perte d’éventuelles aides publiques (FEADER, FranceAgriMer) et, en cas de problème sanitaire, la non-éligibilité aux indemnisations. ↩︎ - Carte d’immatriculation apicole —
Ce document officiel identifie l’apiculteur auprès de l’administration. Il est délivré après la première déclaration de ruches sur la plateforme nationale Téléruchers – FranceAgriMer, conformément à l’arrêté du 7 juin 2010 relatif à l’identification et à la déclaration des ruchers.
La carte comporte :
– le numéro d’apiculteur (NAPI), identifiant unique attribué à vie ;
– les coordonnées de l’éleveur (nom, adresse) ;
– et parfois la localisation principale du ou des ruchers déclarés.
Elle atteste que le détenteur de ruches est inscrit au registre national d’identification apicole, et permet :
– la traçabilité sanitaire du cheptel (visites TSA, alertes maladies),
– la vérification administrative lors de contrôles ou demandes d’aides publiques (FranceAgriMer, FEADER, etc.),
– et l’accès simplifié aux dispositifs collectifs (prophylaxie, lutte contre le frelon, formations sanitaires).
La carte est dématérialisée : elle peut être téléchargée ou imprimée depuis le compte personnel de l’apiculteur sur Téléruchers. Elle reste valable tant que l’apiculteur renouvelle sa déclaration annuelle de ruches.
En cas de cessation d’activité, il suffit de le signaler sur la plateforme pour désactiver le NAPI. ↩︎ - La déclaration de déplacement de ruches, aussi appelée déclaration de transhumance, se réalise selon deux modalités reconnues par l’administration française :
1. En ligne, via la plateforme officielle du ministère de l’Agriculture :
Rendez-vous sur https://agriculture-portail.6tzen.fr/
Connectez-vous à votre espace Téléruchers à l’aide de votre numéro NAPI (Numéro d’Apiculteur).
Dans le menu principal, choisissez « Déclarer un rucher ou un déplacement », puis indiquez :
le nombre de ruches déplacées,
la commune d’accueil,
la date de départ et la date de retour estimée,
les coordonnées GPS ou le lieu-dit, si connu.
Une confirmation électronique vous est envoyée automatiquement.
2. Par voie administrative directe auprès des DDPP concernées (si la télédéclaration n’est pas possible) :
Adressez un courriel ou un courrier à la Direction Départementale de la Protection des Populations (DDPP) du département d’accueil.
Indiquez : votre identité, votre NAPI, le nombre de colonies transportées, les dates de déplacement, et le lieu d’installation.
Vous pouvez également prévenir la DDPP du département d’origine pour mise à jour de votre fiche sanitaire.
📍 Contacts utiles :
– Liste nationale des DDPP : https://agriculture.gouv.fr/ddpp
– Plateforme Téléruchers / FranceAgriMer : https://agriculture-portail.6tzen.fr/
💡 Bon à savoir :
– La déclaration doit être faite avant le déplacement (préventivement, pas après).
– Elle peut être mise à jour à tout moment si les ruches changent de lieu ou si la date de retour évolue.
– Le récépissé électronique ou papier fait foi en cas de contrôle sur la route ou de visite TSA.
Cette démarche permet à l’administration et aux vétérinaires sanitaires d’assurer un suivi précis des mouvements de ruches, garantissant la prévention des foyers de maladies et la sécurité sanitaire du cheptel apicole national. ↩︎ - Déclaration de transhumance —
Tout déplacement temporaire de ruches vers un autre emplacement (pour suivre une miellée, profiter d’une floraison ou éviter un risque sanitaire) doit faire l’objet d’une déclaration de transhumance, conformément à l’article D.223-21 du Code rural et de la pêche maritime et à l’arrêté du 11 août 1980 relatif à la prophylaxie apicole.
Cette déclaration est obligatoire dès lors que les ruches sont transportées hors de leur commune d’attache.
Elle permet d’assurer :
– la traçabilité sanitaire des ruchers,
– la coordination avec les services vétérinaires (DDPP) et les TSA,
– la prévention des contaminations croisées entre zones apicoles.
La procédure est simple :
– L’apiculteur informe la DDPP du département de destination (et parfois celle du département d’origine) avant le déplacement.
– Il précise : le nombre de ruches, la commune d’accueil, la date d’installation prévue et la durée estimée.
– Un bon de transport ou une déclaration écrite accompagne les ruches pendant le trajet (ce document peut être exigé lors d’un contrôle routier ou d’une visite TSA).
En pratique, certaines régions simplifient cette démarche via la plateforme Téléruchers – FranceAgriMer ou via les GDSA locaux qui centralisent les informations.
Cette déclaration a aussi un intérêt écologique : elle contribue à la cartographie des flux apicoles, utile pour prévenir les risques de dissémination de pathogènes (loques, varroa, nosémose) et les conflits d’implantation entre apiculteurs sur un même secteur. ↩︎




